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Market Research dans le monde d’après, avec Stéphanie Perrin

Stéphanie Perrin

Diplômée de l’Institut d’Etudes Politiques de Strasbourg en Relations Internationales.

Créateur et organisateur de salons professionnels (PROseg, Salon professionnel des services généraux et des achats hors production ; RhonAlp’Seg, Rencontres professionnelles des services généraux du grand Sud-Est ; Externaliser ; SIHH, Salon International de la Haute Horlogerie), elle crée Empresarial, société organisatrice de salons et d’événements d’entreprises en 2007.


Analytics & Insights : La crise sanitaire a profondément secoué le monde des études marketing et de la connaissance consommateurs : pour toi, s’agit-il plus d’une rupture ou d’une accélération de tendances déjà existantes ?

Stéphanie Perrin : La crise sanitaire a en effet profondément secoué le monde des études marketing et de la connaissance consommateur. A mon sens, il s’agit plus d’une accélération de tendance qui était déjà bien en marche que d’une révolution ou d’une rupture.

Le 1er confinement notamment a eu un effet majeur : le recours aux études a été au cœur de la compréhension des comportements et des besoins des consommateurs. Leur rôle de pilotage de la décision a été souligné par plusieurs directions générales qui ont interrogé leurs directions études pour saisir les changements en cours alors. Avec une économie atone pour ne pas dire à l’arrêt, des consommateurs confinés, une distribution qui, dans bien des secteurs, a dû faire la place belle à ses canaux digitaux, des équipes études en télétravail, des budgets gelés, et la pression du temps, la digitalisation s’est renforcée. La filière études a su s’emparer de ce temps où le consommateur a eu plus de temps pour répondre à ses sollicitations. Les instituts et les annonceurs ont et réinventé leur écoute quali et accéléré leur recours à des outils digitaux.

La valeur ajoutée des études a joué à plein !

Analytics & Insights : D’un Printemps des Etudes à l’autre, les préoccupations des annonceurs et des instituts évoluent : quel est ton ressenti en la matière ?

Stéphanie Perrin : La finalité des études reste la même : comprendre le consommateur, le citoyen, le collaborateur. L’humain reste au centre des préoccupations des entreprises et des marques. Le faire avec le plus de finesse possible, en l’inscrivant dans des tendances permettant de saisir tout à la fois le cerveau gauche et le cerveau droit du consommateur, voilà le véritable défi d’un monde mouvant et rapide, où le consommateur l’est tout autant que le monde qui l’entoure. Les paradoxes du consommateur et la volonté d’un « toujours plus vite » doivent inciter à une finesse d’analyse sans précédent. Bien des innovations permettent cette nécessaire rapidité, la force de ces outils devant impérativement à mon sens être éclairée par les analyses des professionnels du sujet. Bien des méthodologies restent à imaginer, rien ne saurait remplacer ce savoir des hommes et des femmes d’études.

L’immédiateté reste à relativiser au sens noble du terme, à traduire. Instituts et annonceurs l’ont bien compris et l’ont inscrit dans leur démarche d’innovation produits et d’anticipation de la demande client. Donner de la perspective, s’inscrire dans un temps long, est le principal défi du « monde d’après ».

Analytics & Insights : Prospective, data, AI, neurosciences, communautés, etc. : dans quelles directions se développe la recherche ?

Stéphanie Perrin : Je ne suis pas chercheuse en marketing et ne pourrait vous donner ici qu’un éclairage extérieur. J’observe que de plus en plus de liens et de passerelles entre recherche et entreprises se font dans nos domaines. Ce duo est nécessaire : donner un cadre appliqué à la recherche d’une part et de l’autre permettre d’enrichir les réflexions et méthodologies sont des leviers d’accélération formidables. Le monde des études marketing est un secteur ouvert à ce type d’expérimentation. Il en tire force et légitimité qu’il sait mettre au service de ses clients. Cette hybridation s’appuie sur la curiosité d’esprit des hommes et femmes d’études, sur leur agilité intellectuelle. Elle est au cœur-même des études, son ADN !

La diversité des profils de nos orateurs est souvent l’une des pierres angulaires de la construction de nos conférences sur le Printemps des études. Tous les ans, des chercheurs, membres de l’AFM, viennent en guise non pas de conclusion, mais d’ouverture à nos conférences, partager l’état de leurs travaux sur un des sujets illustrés par des binômes annonceurs / instituts. Ce trio est toujours enrichissant, et on s’aperçoit nettement que le dialogue recherche / entreprises ouvre d’autres champs de réflexion et d’action.

L’hybridation des savoir-faire, l’hybridation des équipes MR sont un des leviers des études d’aujourd’hui et de demain.

Analytics & Insights : De nouveaux acteurs issus du monde des technologies sont apparus dans le champ de la connaissance consommateurs ces dernières années : comment se situent les acteurs plus traditionnels dans ce nouveau paysage ?

Stéphanie Perrin : Dans le secteur Marketing, on a vu apparaître ces dernières années à la fois les premières applications de l’IA, des data lakes, des outils de DIY, des plateformes permettant de piloter son marketing… Le règne du « tout automatisation » semblait avéré.

Les acteurs plus traditionnels suivent de très près ces avancées. En intégrant des data scientists, des neuroscientists, et des spécialistes de l’intelligence artificielle dans leurs équipes notamment. Ils font leurs l’hybridation des métiers dont je parlais précédemment. Ceci se traduit par des méthodologies disruptives, des frontières plus poreuses entre quali et quanti. Les annonceurs de leur côté sont de plus en plus convaincus que la technologie seule ne peut répondre parfaitement à leurs besoins : la valeur ajoutée des études reste sa capacité d’analyse et de mise en perspective. Certains instituts ou acteurs technologiques ont ainsi mis en place des cellules « conseil et pilotage » chez leurs clients annonceurs. L’homme reste central, au cœur du MR !