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Interviews

Market Research dans le monde d’après, avec William Yattah

William Yattah

CEO, Fondateur de Nfluanswers

Analytics & Insights : La crise sanitaire a profondément secoué le monde de la connaissance consommateurs/citoyens : pour toi, s’agit-il plus d’une rupture ou d’une accélération de tendances déjà existantes ?

William Yattah : La crise sanitaire a été sans précédent. Nous étions isolés. Isolés de nos proches, de nos amis, de nos collègues, de nos commerces, de nos lieux de vie, en rupture avec nos habitudes et notre quotidien. Elle a mis un frein à cette course « frénétique ». Elle nous a permis de penser, de nous repenser et de nous redéfinir par rapport à notre relation au monde, tant d’un point de vue personnel que professionnel. On peut nous enlever la liberté physique mais pas la liberté de penser (dixit Florent Pagny).

Nous avons assisté encore une fois à la faculté d’adaptation de l’Homme et à sa faculté de mettre en place toute sorte de « parades » comme par exemple : le développement de courses en ligne, la livraison de produits en tout genre, les appels en Visio pour voir ces proches quitte à même faire des apéro « Zoom ».

Il s’est donc aussi bien produit une accélération de l’utilisation de certaines technologies (Doctolib, Uber-eat pour n’en citer qu’un, ou encore Zoom) ce qui cause forcément une rupture avec nos modes de vie d’avant. Je prendrai comme exemple le remplacement de la carte du restaurant/bar par le scan d’un QRCode. Certains apprécient d’autres toujours pas. Certaines ruptures ne font toujours pas l’unanimité.

Analytics & Insights : Crise sanitaire, mais aussi économique, environnementale, sociétale, les facteurs de stress s’accumulent, le consommateur/citoyen devient de plus en plus complexe et insaisissable … Côté technologies, les bouleversements aussi s’accélèrent : réalité virtuelle, hybridation des données, intelligence artificielle s’invitent dans le débat … De nouveaux acteurs issus du monde des technologies sont apparus dans le champ de la connaissance consommateurs ces dernières années : comment se situent les acteurs plus traditionnels dans ce nouveau paysage ?

William Yattah : Gravitant dans le monde des études depuis une vingtaine d’année, j’ai pu assister et joué un rôle dans l’évolution des méthodes et des technologies. Je dirais qu’on ne peut pas continuer d’essayer d’allumer une ampoule avec une allumette. La société évolue, le consommateur change, les réseaux sociaux se sont développés, les médias traditionnels sont en chute par rapport aux nouvelles générations comme la GenZ par exemple. (Les 15-25 ans) et bientôt la génération Alpha.

On le click plus facile que la plume, le scroll plus rapide que feuilleter un journal ou un magazine. Les acteurs traditionnels ne doivent plus se définir comme « traditionnels » ou du moins on peut être un acteur « traditionnel » ou « historique » et évoluer avec l’époque. Ils doivent évoluer, suivre les tendances, les changements des consommateurs et le développement de la technologie. On ne peut pas observer ces nouveaux comportements de consommation (ou nouveaux consommateurs) à travers des méthodes qui n’ont pas évolué et qui ne sont plus adaptées. Ce serait un comble pour notre profession.

En ce qui concerne Nfluanswers, société que je viens de lancer, ce nouvel acteur se veut justement la solution dans l’air du temps, de l’époque, pour observer et collecter plus intelligemment l’avis de la Génération Z (15-25 ans). Ces jeunes, on le sait, ne sont pas dans des panels, ni sur Facebook, ou du moins ce ne serait pas du tout représentatif. Ils ne souhaitent pas rentrer dans des programmes classiques de sondages. Notre solution permet d’aller les interroger là où ils sont au quotidien : TikTok ou Instagram. Ils suivent des leaders d’opinions et créateurs de contenus sur différents sujets de société qui les touchent. Notre méthode s’appuie donc sur une communauté (créateurs de contenus) de communautés (les jeunes).

Pour dire un mot sur l’accélération de l’IA dans nos métiers, ou plutôt des IAs (on peut se demander finalement laquelle finalement sera la plus intelligente), je dirais attention à ne pas se « tirer une balle dans le pied ». Quand on travaille sur de l’innovation, faire tourner des IAs qui travaillent sur des données du passé, cela ne fait guère sens. L’IA bien utilisée, comme outil pour de productivité oui, mais attention à ne pas tomber dans la paresse intellectuelle. Surtout dans nos métiers.